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jeudi 25 avril 2024

90 ans de la Fastnet

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Ludovic Sorlot
Ludovic Sorlothttps://www.cuplegend.com
Rédacteur en chef du magazine CupLegend

La Rolex Fastnet Race, événement à l’origine de la fondation du Royal Ocean Racing Club, célébrait son 90e anniversaire en 2015. Les pères fondateurs du club et de son événement phare auraient été fiers de leur création.

Avec 356 bateaux qui ont hissé les voiles cette année sur la ligne de départ devant le Royal Yacht Squadron à Cowes, la Rolex Fastnet Race est de loin la plus grande course classique de 600 milles nautiques du monde en terme de participation. Elle attire les meilleures équipes du monde entier, avec des bateaux allant de Spindrift 2 et Comanche, respectivement le multicoques et le monocoque de course au large les plus rapides du monde, jusqu’à Contessa et des Dehler 32 de course-croisière, et tout ce que l’on peut concevoir comme bateau avec un air de course au large entre les deux. Dans les premiers échelons de la flotte, on retrouve de nombreux vainqueurs de l’America’s Cup et de la Volvo Ocean Race, ainsi que des médaillés Olympiques et des champions du monde, tandis qu’à l’autre extrémité on compte des écoles de voile et des équipages de familles pour qui cette course, qui a lieu tous les deux ans entre Cowes et Plymouth via le rocher du Fastnet au Sud-Ouest de l’Irlande, représente le pinacle de leur saison de voile, ou même encore de toute leur carrière de marins.
Avant le départ, il semblait que les prévisions pour la course de cette année seraient les plus légères de toute son histoire. Dans les faits, les neuf bateaux les plus rapides ont bouclé le parcours dans un temps raisonnable avant que les hautes pressions sur la mer Celtique ne voient le vent disparaître du plan d’eau de la course pour 36 heures. Ceci a provoqué de nombreux arrêts et tentatives de halage en eau profonde. Ces conditions, qui ont affecté tous les bateaux, sauf les plus lents de la flotte géante, ont perduré jusqu’à ce que les systèmes de fronts habituels aient repris le mercredi, permettant un finish rapide, en particulier à partir de la moitié de la flotte.
Par contre les prévisions ne se sont pas trompées en ce qui concerne les différents départs, qui ont eu lieu à intervalles réguliers entre 12h00 et 13h40 BST dimanche 16 août, puisque ceux qui sont partis les premiers, et même les agiles multicoques, ont eu du mal à franchir la ligne de départ contre la fin de la marée montante. Et quand la marée est devenue favorable, la situation s’est avérée désastreuse pour les bateaux qui ont passé la ligne trop tôt, puisqu’il leur a fallu plus d’une demi heure pour faire demi tour et revenir couper la ligne dans les règles.
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Premiers sur la ligne d’arrivée

Pour les bateaux en tête de la flotte, le moment clé est arrivé au moment où la marée s’est inversée au large du Cap Lizard lundi matin. C’est là qu’a débuté la séparation la plus spectaculaire dans une course à la voile, entre les cinq multicoques et les quatre monocoques qui s’échappaient en tête, et ceux qui avaient raté le train.

Les leaders, avec Yann Guichard et Dona Bertarelli en tête des multicoques à bord de leur trimaran de 40m, Spindrift 2, et le 100 pieds de Jim Clark et Kristy Hinze Clark, Comanche, en tête des monocoques, ont très vite rejoint le rocher du Fastnet. Le moment clé de la course des monocoques a été lorsque le Rambler 88 de George David et le Leopard de Mike Slade, qui suivaient les multicoques, sont passés au Sud des îles Scilly à l’aller, alors que Comanche et le Maxi 72 de Dieter Schon, Momo, sont passés par le Nord.

Les premiers sur la ligne d’arrivée en multicoques et en monocoques ont tous deux fait des courses remarquables, en ce que ceux qui étaient clairement favoris n’ont pu se débarrasser de ceux qui étaient à leur poursuite, avec Spindrift 2 qui s’est fait dépasser une fois par le double vainqueur de la Route du Rhum Lionel Lemonchois à bord de Prince de Bretagne, tandis que Comanche a dû employer une tactique lui permettant de contrôler Rambler 88 qui persistait à revenir. C’est Spindrift 2 qui a terminé à 22:57:41 BST mardi soir, plus d’une journée de plus que son propre record, avec Lloyd Thornburg et son MOD70 Phaedo 3 en deuxième position, deux heures et 10 minutes plus tard.

Les monocoques en tête se sont aussi retrouvés scotchés faute de vent autour du rocher du Fastnet, mais ils étaient substantiellement plus proches pour finir, avec Comanche qui a terminé à 05:22:26 BST mercredi matin, seulement quatre minutes et demie devant son rival, Rambler 88. Parmi les bateaux qui menaient, seul Momo a fait impression par rapport au handicap, le Mini Maxi Allemand étant finalement arrivé le premier en IRC Zero.
Le skipper de Comanche, Ken Read, a partagé son point de vue sur la course : « c’est honnêtement l’une des courses les plus bizarres à laquelle j’ai participé de ma vie : partir, s’arrêter, repartir, avec des concurrents laissés pour compte derrière, et qui finalement reviennent soudainement naviguer autour de vous, c’était phénoménal. »
Un maximum de douleur
Les bateaux arrivés immédiatement après les premiers sont ceux qui sont arrivés au finish à Plymouth en ayant eu la course la plus « noir ou blanc ». Pour le côté noir, c’était de se retrouver complètement arrêté plus d’une journée entre le cap Lizard et les îles Scilly, le bateau nommé Paradox du Californien Peter Aschenbrenner a par exemple parcouru seulement 15 milles en 10 heures, un processus qui a généré un écart énorme au sein de la flotte, de la taille des 130 milles qui séparent le rocher du Fastnet des îles Scilly, entre Momo et Paradox.
Toutefois, le trimaran argenté de 63 pieds a rattrapé ces 24 heures de conditions légères en effectuant une course flamboyante entre le rocher du Fastnet et Plymouth, parcourant les 256 milles en tout juste 13 heures et 51 minutes (comparé à 1 journée et 6 heures pour Spindrift 2). Ce qui était suffisant pour lui garantir le prix du handicap dans la classe des multicoques MOCRA.
Alors que Paradox menait un petit groupe du côté Ouest du Dispositif de Séparation du Trafic de Land’s End, un autre groupe a égalé le même temps en essayant le côté Est. Ce groupe incluait les neuf IMOCA 60, l’équipe VO65 SCA et le VO70 Camper. Arrêtés au large de Land’s End, une grosse compression s’est effectuée dans la flotte, avec des bateaux comme celui de Ron O’Hanley, le Cookson 50 Privateer, ainsi que le Carkeek 47 Black Pearl de l’Allemand Stefan Jentzsch, rattrapant les 60 pieds et plus.
Le vent est aussi rentré pour ce groupe mardi matin, et c’est Paul Meilhat avec le double vainqueur du Vendée Globe, Michel Desjoyeaux, à bord de SMA, qui ont mené le groupe de l’Est autour du rocher du Fastnet, à peine 30 minutes derrière Paradox. Ils ont eux aussi profité d’un retour rapide depuis le rocher, mais, et ce qui prouve que même les meilleurs marins du monde ne sont pas infaillibles, SMA a raté une marque du parcours, Bishop Rock, à l’Ouest des îles Scilly, et a choisi de se retirer de la course après cela. Ce qui a donné la victoire en IMOCA 60 au vainqueur du Vendée Globe 2004, Vincent Riou, et au barreur de l’équipe Française sur l’America’s Cup en 2007, Sébastien Col, à bord de PRB. Même s’ils disposaient d’un équipage complet, les VO70 et VO65 sont arrivés sur les talons du deuxième IMOCA 60 mené en double par Yann Eliès et Charlie Dalin sur Quéghiner-Leucémie Espoir.
Les flottes IRC, autre domination des Français
Toutes classes IRC confondues, la France remporte cette année sept des 10 premières places et parvient presque à tout rafler sur les différentes classes IRC.
Pour la deuxième course consécutive, le Mach 45 de Nicolas Groleau Bretagne Telecom remporte la course en IRC Canting Keel, son temps compensé lui permettant de terminer juste devant Privateer. La classe IRC Zero a été la seule où la France n’a pas brillé, puisqu’elle n’y avait presque aucun inscrit.
La Classe IRC 1 est remportée par Samuel Prietz et son Ker 39 GOA, son temps compensé lui donnant environ 30 minutes d’avance sur le Sud Africain Mike Bartholomew à bord de son GP42 Tokoloshe II, qui est lui arrivé cinq minutes avant le mini VO70-type A13 d’Eric De Turkheim, Teasing Machine.
En IRC2, c’est une énorme victoire pour le MC34 Nutmeg Solidaire En Peleton, mené par le skipper de 28 ans Corentin Lognone, qui gagne de 2 heures et 22 minutes sur son sistership Belge, Azawakh, de Vincent Willemart et Eric Van Campenhout.
Mais même la performance de Nutmeg a fait bien pâle impression face à Géry Trentesaux et son JPK 10.80 Courrier Du Leon, qui gagne en IRC 3 avec handicap, ainsi que la Rolex Fastnet Race toutes classes confondues, battant non seulement tous ses adversaires en IRC 3 sur l’eau, mais aussi tous les plus gros bateaux en IRC 2.
La France a enfin complété sa moisson de trophées avec l’ancien vainqueur de la Transquadra, Gérard Quenot, qui gagne quant à lui en IRC 4 à bord de son JPK 10.10, Alkaid III-Nautistock.com.
La Grande Bretagne sauve l’honneur modestement avec les expérimentés Stuart Childerley et Kelvin Rawlings à bord de leur J/105 Jester, une victoire dans cette classe en double d’habitude dominée par les Français.
Les premières places au classement général IRC ont généralement été remportées par des bateaux en IRC 3 ET 4, ce qui suggère que le meilleur participant pour coller aux conditions de cette année devait être un bateau bien mené, de type petit IRC, rapide. Tactiquement parlant, les parties les plus importantes de la course pour ces bateaux étaient d’être capables de rester juste au Nord du Dispositif de Séparation du Trafic des Casquets la première nuit, puis de raser les côtes du Devonshire et de la Cornouaille entre Start Point et le Cap Lizard. Surtout, ces bateaux ont réussi à manquer les hautes pressions entre les îles Scilly et le rocher du Fastnet, ce qui a eu pour résultat ces arrêts qui ont affecté tous les plus gros bateaux, qui sont aussi plus rapides.
Un Géry Trentesaux Triomphant
L’un des marins les plus expérimentés du RORC, Géry Trentesaux, remporte cette année la Rolex Fastnet Race pour sa 13e tentative sur cette course, après sa première participation en 1977. Le marin Français, qui a précédemment mené la victoire de la France dans la Commodore’s Cup en 2006, et qui a également fait partie de l’équipage victorieux de l’Admiral’s Cup en 1991, naviguait cette année à bord d’un JPK 10.80, le dernier modèle du fabricant Français basé près de Lorient, et dont le modèle 10.10 a remporté la course au général en 2013.
La performance de Courrier Du Leon a été cette année la plus remarquable, après qu’une erreur coûteuse et inhabituelle lui ait causé d’être trop tôt sur la ligne de départ, dans la pétole et contre la marée, et où il leur aura fallu 40 minutes pour revenir passer la ligne dans les règles. Malgré ce revers, l’équipe Française est parvenue à prendre la tête en IRC 3 alors qu’elle passait le Cap Lizard tard lundi soir, et qu’elle avait pris de l’avance sur tous les IRC 2 au milieu de l’armada géante de bateaux qui traversaient la mer Celtique en direction du rocher du Fastnet.
Courrier Du Leon remporte finalement la course de 2 heures et 20 minutes sur son sistership mené par Arnaud Delamare et Eric Mordret, Dream Pearls, qui termine second en IRC 3 et aussi au général en IRC.
En plus d’avoir un bon bateau, Géry Trentesaux avait aussi l’un des meilleurs équipages – Aubry Arnaud, Antoine Carpentier, Jean Louis Couedel, François Lamiot, Pierre Ghewy et le Figariste Jean-Pierre Nicol. Cinq d’entre eux naviguent avec Géry Trentesaux depuis la Rolex Fastnet Race 1999, tandis que François Lamiot a toujours couru avec lui depuis qu’ils ont participé ensemble au circuit Figaro au milieu des années 1980.
« Je pense que nous sommes très durs sur le bateau », a déclaré Géry Trentesaux. « Si je leur demande de hisser le spi, puis cinq minutes après nous l’affalons, et que cinq minutes plus tard nous le hissons à nouveau, il n’y a pas de questions … »
A propos du succès de Géry Trentesaux, Michael Boyd, Commodore du Royal Ocean Racing Club, a déclaré : « Géry est un gagnant fantastique. Tout d’abord, c ‘est un homme charmant et il a été un grand supporter du RORC depuis de nombreuses années. Tout l’été, son bateau était celui à suivre. C’est un résultat formidable, gagner de deux heures et demie est tout simplement extraordinaire. »

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